samedi 5 juin 2010

Consubstantialité et Carte Heuristique

J'ai découvert les cartes heuristiques avec Catherine Besnard-Péron dont la source est l'Ecole Française d'Heuristique (le blog est aussi riche de situations et de très belles cartes en tous genres).

La carte heuristique est un outil qui, au delà du langage séquentiel, fournit une vue globale (par l'image) et permet de fournir un sens et une direction à l'ensemble des liens mis en évidence entre tous les items du langage (que ce soit des mots ou groupes de mots ou d'autres images ou symboles ou d'autres cartes heuristiques...). En fait, la carte heuristique est une vue de la complexité, le nœud qui couple les deux étant le lien. Une carte heuristique est un ensemble de liens. Des liens qui mettent en relation des "objets". Nous pouvons donc dire que finalement une carte heuristique propose un ensemble de relations, en relation entre elles !
Ce qui est amusant est que pour un même ensemble de relations, il existe un grand nombre (issue d'une combinatoire sur le nombre de relations) de cartes heuristiques différentes : on peut imaginer, selon la terminologie topologique, que l'ensemble de ces cartes possibles appartiennent au même "atlas", ce dernier définit en fait un espace fini, limité à l'ensemble des relations (initiales) décrites, chaque carte ayant très souvent un sens différent et donc une orientation sémantique différente et unique selon la description spatiale des relations mises en œuvre (une carte heuristique devant en toute rigueur être "centrée", donc orientée). Dit autrement, chaque carte est une image différente du même espace relationnel, chaque carte va être décrite selon un discours séquentiel différent et l'histoire produite ainsi sera différente. Il est évident qu'il existe un grand nombre d'histoires différentes, toutes uniques, pour une même carte heuristique et donc pour un "atlas" du même espace relationnel. Ainsi, il est aisé de constater que pour un même ensemble fini de relations, il existe un très grand nombre d'histoires, de récits, combinant ces relations. Tous ces récits, enfin, décrivent chacun un espace-temps (qui n'est que relationnel, rappelons nous) unique, certains n'ayant aucune "chance" (probabilité) parfois d'être "réalistes" i.e. réalisables dans notre réalité physique conjointe.

Ainsi, une carte heuristique décrit sous une forme concise et parfois universel (inter-cultures) une complexité, riche de possibles, probables et improbables. Ces probabilités sont restreintes par des lois physiques, notamment celle de thermodynamique, mais aussi (ou surtout ?) par la motivation de celui qui la crée et qui, par cet acte, limite les possibles et fais surgir les probables, même les plus infimes. C'est in fine, la motivation qui va sélectionner les relations à relier entre elles de telle manière, dans tel espace restreint défini. A chaque carte correspond bien souvent une motivation et une seule, une orientation, un sens général, ce qui n'empêche pas, par la suite, le lecteur de la carte de pouvoir y puiser et créer à son tour plusieurs histoires uniques et différentes re-créées à chaque lecture. A ce titre, la carte heuristique contient un nombre d'informations impressionnant sur un espace physique limité.
Elle peut être une très belle métaphore également pour saisir la réalité de notre environnement, la réalité "contextuelle" ou consubstantielle à l'observateur, au lecteur de la carte/réalité, tout en n'oubliant jamais que la "carte n'est pas le territoire" (A. Korzybski), seulement un pâle reflet. Même si nous considérons la localité non séparée de la globalité (comme ce que nous apprend sur la réalité la physique quantique), "la connaissance locale", même a priori "infinie", "ne conduit pas (nécessairement) à une connaissance globale" (cf N. Lygéros et sa M-Classification [2.12] (déjà cité)).

La carte heuristique est également reliée au modèle d'organisation cognitif du cerveau : "cerveau gauche/cerveau droit" puisqu'elle met en avant une organisation spatiale de représentations d'images (au sens large) reliées entre elles, à l'instar de l'hémisphère droit qui "capte" les représentations sensorielles relativisées. Une carte heuristique peut ainsi ne contenir que des symboles directement "lus" par cet hémisphère, à charge pour l'hémisphère gauche de les relier avec d'autre symboles du langage lors de la lecture. Le sens orienté du langage (séquence temporelle et linéaire) fournit alors le sens orienté de la carte, au moment de la saisie/lecture. Nous revenons ici clairement à la saisie de l'univers/objet par l'univers/sujet, saisie qui crée/déploie l'espace-temps de manière unique. Nous y reviendrons...

Enfin, une carte heuristique est par définition un ("objet") ouvert (ou plus rigoureusement un recollement d'ouverts disjoints) et l'espace relationnel représenté est un système formel gödelien, donc soit incomplet, soit indécidable, en tous les cas, complètement indéterminé. Cette indétermination lui permet à la fois un très haut niveau d'abstraction (une vue transcendante et synthétique voire abductive) et à la fois un très haut niveau d'analyse fonctionnelle et opératoire (une vue formelle dans une logique du tiers inclus). Une carte heuristique peut donc servir à tout le monde, en de maintes occasions...!

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