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dimanche 23 mai 2010

Relience III

Dans Relience II, nous constatons à la fois de grandes perturbations dans la logique explicitée des faits discutés et à la fois une grande sérénité lumineuse entraperçue sur le chemin à suivre désormais. Tout cela apparaît cependant bien mystérieux...

Dans Féminin/Masculin..., nous effleurons le concept du sexe et de sa dualité dans notre société par le prisme du médical, éclairé d'anthropologie. Nous proposons la lecture de cette dualité aussi ancienne que le monde comme un renversement et élaborons ainsi une triade lié au temps où tout réarrangement des deux principes, masculin et féminin, est finalement possible. Ce n'est qu'une étape...

Dans {Vie, Mort, Conscience}5è dimension , nous poursuivons notre quête sur le concept de la mort, qui nous renvoie in fine sur celui de la conscience et de la vie, en questionnant les expériences troublantes mais néanmoins significatives des EMI (NDE). Une interprétation pragmatique et physique nous envoie sur un univers à 5 dimensions où nous trouvons d'emblée de nombreuses résonances avec l'ensemble de nos préoccupations existentielles (explicitées en partie dans ce blog). Mais ce n'est aussi qu'une étape...

Dans Discontinuité et A-causalité, nous questionnons frontalement la rupture, ce qui nous amène à la mettre en relation avec une triade lupascienne que nous tentons provisoirement de coupler avec la causalité : tout ceci reste ouvert sur l'arbitraire de l'intention...

Dans Champ et Quantum : échanges autour d'un seuil : nous reprenons la métaphysique de la physique quantique pour explorer en détail les concepts de quantum et de champ, ce qui nous amène in fine à la triade de B. Nicolescu : ( énergie ; discontinuité ; seuil ). La vue sur le monde est locale mais reste inséparable de toutes les vues déjà réalisées, se réalisant et à réaliser, cette vue est essentiellement relationnelle et réciproque : c'est bien la vue qui "fait" le monde et le monde qui "définit" la vue.

Dans Le vide est plein, nous proposons une lecture "physique" d'un ancien concept dû sans doute à Anaximandre, l'apeiron, d'où tout arrive et où tout repart...

Dans Je suis né un jour bleu, nous relatons une lecture très résonante du premier livre d'un garçon très singulier, cette lecture nous amène à réfléchir à la "symptomatologie" du HPI et au fameux algorithme qui engendre l'hyper-structure dont nous avions parlé dans Le réveil de la source.

Dans Logique de l'Energie et Sens, nous revenons sur la logique du tiers inclus développé par Stéphane Lupasco, commentée par Basarab Nicolescu et Dominique Temple. Ce nouvel éclairage colore rétroactivement l'ensemble des articles déjà écrits, notamment ceux de Relience III, nous commençons à percevoir sérieusement que l'espace-temps dans lequel semble plongé notre écriture et nos pensées est très loin du cadre Newtonien commun. Cette logique de l'Energie renvoie à la triple dialectique de la matière : ce triplet qu'il est tentant de voir partout à l'œuvre dans toute dynamique mais qu'il est sage d'implémenter a postériori. Enfin, nous butons sur l'arbitraire du sens et de la motivation implicite de tout système formel, de toute logique...

Dans Autisme : Malvoyance de l'E-motion, nous revenons sur ces troubles autistiques avec une thèse fort originale de Bruno Gepner. Nous dégageons l'heuristique de ses travaux théoriques et cliniques tout en regrettant in fine une incomplétude conceptuelle et arbitraire : l'a-normalité n'est pas relativisée car la logique de travail reste celle, dominante, de l'exclusion.

Dans Bardo Thödol : un renversement !, nous présentons la pensée et la posture d'un homme, découvert il y a peu, qui amène lui aussi un éclairage décapant sur l'existence humaine. A la manière de Swami Prajanpad, il nous invite d'ailleurs à expérimenter notre vie plutôt que de la penser, à voir et connaître, vraiment. Fabrice Midal nous présente à cette occasion celui qui a été son maître tibétain : Chögyam Trungpa et nous reviendrons sur la pensée de cet homme si singulier. Nous ébauchons enfin une analogie entre la logique lupascienne et la posture bouddhiste.

A ce point, le mystère s'allège et nous comprenons enfin que les grandes perturbations ressenties plus tôt étaient dues à nos lunettes sur le monde, à la logique implicite de la métaphysique dans laquelle nous sommes immergés : l'exclusion ! La sérénité lumineuse entraperçue est à explorer ...Il est troublant a postériori de constater que cette fameuse "lumière", ce spectre de l'univers, était déjà là, au tout début de ce blog et ses portes ouvertes étaient nombreuses (cf Le temps de la lumière ...)...
Notre exploration est au moins spiralée...!

mardi 6 avril 2010

Autisme : Malvoyance de l'E-motion : Heuristique Incomplète ?

C'est en écrivant sur Daniel Tammet que j'ai croisé les écrits de Bruno Gepner, professeur en psychiatrie à Aix en Provence qui s'est intéressé à "l'autisme" (les Troubles du Spectre Autistique - TSA).

Ce praticien hospitalier a présenté en 2005 lors d'une conférence l'essentiel de ses travaux sur le sujet. Bruno Gepner souhaite réaliser une approche complexe, c'est à dire reliante, et simple, c'est à dire facile à appréhender. Les TSA sont nombreux, leur étiologie est "éclatée", les processus mis en jeu sont très variables, les "mécanismes neuro-bio-physio-psychopathogéniques qui [les] sous-tendent" ne sont pas compris. Or, comme le souligne ce professeur, "Ce manque de compréhension globale a produit et continue de produire des développements théorico-cliniques et des applications thérapeutiques très divers et parfois hasardeux et/ou incompatibles."

Dans cet article, Bruno Gepner présente une synthèse (en 2006) de sa démarche originale.

Il constate tout d'abord (p.5) que l'énigme de "l'autisme" persiste car, dans la carte heuristique des TSA, "l’énigme du noyau des désordres autistiques demeure". Cette carte heuristique relie des faisceaux : constellation de troubles neuro-développementaux, multiplicité de facteurs de risques d'origines diverses, nombreux mécanismes physiopathogéniques affectant de nombreux systèmes neuro-fonctionnels, nombreuses réactions émotionnelles et psychologiques, nombreux désordres associés voire recouvrants les TSA... Cet ensemble heuristique, Bruno Gepner le nomme "Constellation Autistique". Ainsi, il constate une continuité déroutante voire impossible à saisir par une démarche classique réductionniste et tente l'approche holistique.
Il se pose une question déterminante : "jusqu’à quel point cette personne [atteinte de TSA] est-elle différente de nous ? Il définit trois voies d'approche qu'il va suivre en parallèle : subjective (expérience racontée par des "autistes"), intersubjective (expériences cliniques racontées par les parents et/ou soignants) et objective (expériences scientifiques et statistiques).

Bruno Gepner retrace ensuite un grand ensemble d'arguments qui l'ont conduit à supposer que les "autistes" pourraient souffrir de désordres de la perception visuelle ou intégration du mouvement, ce qu'il nomme : la malvoyance du mouvement voire, en le généralisant à l'ensemble des mouvements (physiques et biologiques) : la malvoyance de l'E-motion rapide (comme émotionnelle et motionnelle) dans les désordres de la constellation autistique. Ces arguments sont aussi bien d'ordre cliniques, directs ou issus de films familiaux "d'autistes", issus de témoignages écrits directs ou indirects "d'autistes", issu d'un cas de neuropsychologie adulte ou de la recherche en neuropsychologie cognitive sur le traitement de reconnaissance des visages.
La malvoyance du mouvement concerne d'abord des désordres liés à un dé-couplage visuo-postural et ensuite des désordres sur le couplage visuo-oculomoteur. Enfin, des expériences de présentation dynamique des mimiques faciales émotionnelles et non-émotionnelles montrent aussi une malvoyance du mouvement facial, proportionnelle au degré de sévérité du syndrome autistique. Ainsi Bruno Gepner écrit : "Le facteur vitesse du mouvement semble critique pour les enfants autistes : pour certains d’entre eux, hypersensibles au mouvement, plus la vitesse du mouvement augmente, plus le mouvement devient aversif ; pour d’autres, plus le mouvement est rapide, moins il est perçu, ce que nous avons résumé par le concept de déficit d’intégration du mouvement visuel rapide". A ces désordres, le psychiatre relie tout un ensemble neurophysiologique logiquement impliqué.

Bruno Gepner postule ensuite que son concept de malvoyance de l'E-motion est un cas particulier "d’anomalie du traitement temporospatial des événements ou flux sensoriels dans l’autisme." Il relie ainsi au domaine visuel, les sphères auditives et tactilo-kinesthésiques, très souvent altérés et impliquées dans les TSA, les autistes ayant en quelque sorte une hyper ou hypo sensibilité aussi aux sons et aux pressions tactiles. Des résultats expérimentaux étayent cette hypothèse et montrent ainsi que cette anomalie du traitement temporospatial des flux sensoriels dépasse largement le cadre de la constellation autistique (dyslexie, dysphasie etc..).

La démarche du praticien, originale, permet ainsi une lecture neuve sur des symptômes étudiés depuis fort longtemps : c'est une démarche abductive et heuristique parfaitement intégrée (voir de l'Ouvert à la systémique) comme il le souligne lui-même (p.18) :"Cette approche unitaire des désordres autistiques pourrait rendre compte de l’évitement sensoriel des personnes autistes (quand le flux sensoriel est aversif), et secondairement de leur évitement social, mais aussi du découplage perception-action et de leur désaccordage sensorimoteur, de leur désordres de compréhension verbale et émotionnelle, et in fine de leurs anomalies de compréhension du monde physique et humain qui les entoure et de leur désaccordage social et affectif".

Ensuite, Bruno Gepner relie ces désordres autistiques (unifiés sous le concept général d'anomalies du traitement temporospatial des flux sensoriels) à des bases neurobiologiques.
Ces dernières apparaissent selon deux "plans" : le premier est lié à une désynchronisation neuronale (soit en excès, soit en défaut), source des désordres attentionnels, perceptifs et cognitifs des autistes. [la synchronisation neuronale est la décharge simultanée de neurones d'une même assemblée, mécanisme crucial pour les processus "de l’attention consciente, de la mémoire de travail, de l’appariement des concepts, de la décision lexicale, de la perception consciente d’une forme globale"]
Cette désynchronisation neuronale peut apparaitre plus généralement comme une dys-synchronie multi-systèmes entre des réseaux neuronaux et voies neurofonctionnelles que certains auteurs voient aussi dans l'épilepsie par exemple.
Le deuxième plan est la contrepartie spatiale de cette désynchronisation neuronale à savoir un défaut ou un excès de corrélation spatiale par co-activation entre aires cérébrales. Ainsi, la dys-synchronie multi-systèmes a comme contrepartie spatiale une dys-connectivité multi-systèmes. De nombreuse études (par IRM par exemple) récentes montrent l'existence de dysconnectivités cérébrales dans les TSA.

Bruno Gepner conclut : "En bref, nous pensons que les difficultés des personnes autistes à percevoir les événements ou flux sensoriels en ligne (c’est-à-dire au moment où ils leur parviennent), à intégrer ces flux dans leur corps propre, à coupler en temps réel perception et action, et à s’accorder cognitivement et émotionnellement à autrui dans les échanges communicatifs et sociaux, pourraient être une traduction comportementale et neuropsychologique de cette dyssynchronie et dysconnectivité multisystème, que celles-ci soient d’ordre structural et/ou fonctionnel." Et le praticien de voir encore plus loin, quand il propose que ce concept de dys-synchronisation/connectivité neuronale soit aussi à l'œuvre dans un certain nombre de troubles neurodéveloppementaux ou maladies neuropsychiques.

Enfin, le psychiatre ouvre son propos sur des perspectives psychologiques et philosophiques fort intéressantes. Il propose notamment une vue des TSA comme un modèle de dissociation esprit/cerveau et suggère "un continuum entre pensée, langage et action en terme de degrés d'énergie et de matérialité."

Il rappelle d'abord qu'il avait déjà proposé que "la pensée en images statiques (...) pouvait constituer une sorte de signature de l'autisme typique." Il propose maintenant qu'il "existe une corrélation logique entre continuum de traitement sensoriel et continuum de mode de pensée.(...)Selon notre hypothèse, il y aurait donc une corrélation entre degré de désordres de traitement temporel des flux sensoriels et de malvoyance é-motionnelle d’un côté, et degré de fluidité et de dynamique de la pensée de l’autre."
[Je reste perplexe ici lorsque Bruno Gepner souligne (p.22) que le mode de pensée essentiellement visuel, tel que vécu dans le rêve par exemple est "archaïque sur le plan développemental"]
Selon cette approche neuropsychodynamique de la pensée, "celle-ci (...) est très profondément inscrite dans le mouvement. (...) Altéré dans sa capacité à associer et intégrer le mouvement physique et humain, les flux sonore et tactilo-kinesthésique dans son monde intérieur, l'enfant autiste sera aussi perturbé dans le ressenti et l’expression de ses émotions et de sa pensée". Or d'après son approche des TSA, vues comme une malvoyance de l'E-motion, cas particulier de dys-synchronisations/connectivités neuronales, Bruno Gepner "suppose qu’une telle pensée fonctionne en dehors de l’espace-temps ordinaire, dans un espace-temps difficile à imaginer, désynchronisé, discontinu, distordu, morcelé, fragmenté, et sans doute assez effrayant."
Schématiquement, il propose donc un isomorphisme rigoureux entre perception/intégration du mouvement et mode de pensée, et au vu de la symptomatologie des TSA, il imagine un mode de pensée associé. Enfin, par causalité "normale", ce mode de pensée très singulier expliquerait certains comportements très singuliers : il s'agit donc d'une boucle de rétroaction entre mode de pensée et traitement sensoriel, les deux s'influençant mutuellement.

Cependant, confronté à ce nœud de régulation, Bruno Gepner est "obligé" d'aller chercher plus en avant une explication : il la propose dans le concept de dissociation psychisme-cerveau, concept qui s'ancre dans le dualisme interactionniste cher à Sir John Eccles.
Car certains témoignages directs d'autistes rapportent non pas une pensée fixe et discontinue mais plutôt une dissociation entre leur pensée (leur intention et leur volition) et leurs actes corporels (de manière plus "faible" par exemple qu'un looked-in-syndrome).
"Selon cette perspective, l’autisme procéderait de désordres de la liaison entre leur attention, leur intention, leur volition, leur conscience, d’une part, et leur cerveau et leur corps d’autre part. L’unité psychosomatique se serait mal construite, mal unifiée.(...) Selon nous, l’esprit et le corps des personnes autistes fonctionnent dans des dimensions relativement séparées, avec insuffisamment d’influences réciproques entre eux."
En fait, l'important pour la suite est de bien comprendre que ce n'est pas le fait que l'esprit et le corps soient dans des dimensions séparées qui provoque des TSA mais bien le fait que l'unité entre eux ne fonctionne pas bien. Il s'agit bien pour Bruno Gepner d'un problème d'attention au présent, à l'instant, d'un problème de connexion à cet instant présent (à du moins ce que la société nomme "cet instant présent").

Il rappelle alors les travaux de Eccles et de Beck qui en postulant des effets quantiques au cœur du fonctionnement du cerveau ont proposé que l'intention et la volition, vus comme des états psychiques conscients immatériels, agissent sur le cerveau par le biais de la synchronisation neuronale. Des travaux plus récents (Varela et Lutz notamment) apportent des arguments "quantitatif[s] et qualitatif[s] majeur[s] en faveur de l’influence d’une activité mentale ou psychique consciente sur le cerveau, et ouvre selon nous la voie à un champ immense de possibilités théorico-cliniques."
Ainsi, Bruno Gepner propose "que le psychisme et le cerveau fonctionnent à/dans des degrés de matérialité distincts, qu’ils sont étroitement et logiquement compatibles entre eux le temps d’une vie humaine, deviennent quasiment indistincts l’un de l’autre en cas de fonctionnement neuro-psychique ordinaire, mais se dissocient et fonctionnent de manière relativement autonome l’une par rapport à l’autre en cas de maladies neuro-psychiques (Gepner, 2003)."
Nous reviendrons sur ces travaux de dissociation psychisme-cerveau plus longuement dans un autre article...

En conclusion, la démarche de Bruno Gepner est singulière mais riche : elle se veut heuristique, abductive voire systémique. Suivant trois voies d'approche des TSA (subjective, intersubjective et objective), il induit, de proche en proche, au sein d'une "constellation" en 3D, de nombreux concepts explicitant et englobant ces derniers, de la malvoyance du mouvement jusque in fine dans le paradigme de "dissociation psychisme-cerveau". Cette démarche n'est pas seulement spéculative mais débouche aussi sur une approche clinique pragmatique de soins particuliers prodigués à l'autiste se basant sur un logiciel destiné à ralentir les mouvements et la parole d'un interlocuteur afin d'en mesurer les effets sur ses capacités imitatives et de compréhension du langage.


Il reste un éclairage dans les propos de Bruno Gepner qui me laisse cependant perplexe.
Lorsque celui-ci prend du champ sur les TSA, il étend le domaine de "l'a-normalité" singulière de ces troubles en les reliant à d'autres pathologies. De ce fait, au sein d'une constellation (un ou des nuage(s) heuristiques) autistique qui se veut extension dimensionnelle d'un continuum, où placer la ou les frontières avec la "normalité" ?
De fait, Bruno Gepner ne répond pas directement et frontalement à cette question théorique (qui reste en suspens suite à sa construction conceptuelle) et pragmatique ("jusqu’à quel point cette personne [atteinte de TSA] est-elle différente de nous ?") autrement que par une extension tendancieuse de "l'a-normalité" face à une normalité bien mystérieuse, vue comme une limite de son modèle, implicitement pourtant connue de tous.
Ce praticien s'interroge en effet sur la notion de personnalité autistique (p.23 et 24) qui serait réponse à cette question : "peut-on trouver une condition autistique encore plus légère, qui ne serait pas encore dans le registre de la normalité, mais qu’on pourrait nommer personnalité autistique ?" et définit ensuite quelques traits assez réducteurs : "Considérons qu’elle serait au minimum marquée par la solitude, l’isolement ou l’indépendance, des intérêts abstraits, une tendance contemplative et un sens social peu développé." Cette personnalité étant pour lui le ferment indispensable à l'émergence de TSA suite à une évolution accidentelle (par hasard, darwinienne ?) de la personne par intégration de désordres d'épi-genèse et d'auto-organisation.
Enfin, la personnalité autistique est aux TSA ce qu'un trouble de la personnalité est à une maladie mentale et permet selon lui "de rendre compte de la réalité clinique et psychopathologique subtile et quasi-infinie des désordres de la constellation autistique." [c'est moi qui souligne !]
Ainsi, si je saisis bien ces propos de psychiatre, le modèle qu'il prend bien soin de construire se veut tellement englobant qu'il repousse effectivement "l'ordinaire", la "normalité", le non malade mental, comme une simple limite, quasi-absolue, en tout cas très fermée, d'une constellation très ouverte et très recouvrante d'a-normalité, de maladies, d'extra-ordinaires (?). Bruno Gepner est donc très convaincant et très ouvert dans sa démonstration mais il semble bien in fine se limiter cependant à une logique très binaire : être malade ou pas ! Le malade, c'est bien connu, se cachant évidemment dans le non-malade et le non-malade devenant de fait presque un artefact !

Il me semble, en tout cas, que Bruno Gepner ne peut manquer d'investiguer cette question implicite et très prégnante dans son métier : qu'est ce que n'être pas malade ? afin que sa démarche intellectuelle, telle qu'il l'expose sur l'autisme, devienne vraiment complète. Car, lorsqu'il écrit que l'énigme de l'autisme demeure parce que "l’énigme du noyau des désordres autistiques demeure" (déjà cité plus haut), je lui retourne l'argument : n'est ce point, in fine, à cause de l'énigme du noyau de l"ordre" "normal", "ordinaire", du non-malade ?

vendredi 5 mars 2010

Relience II

Dans Relience I, nous mettions en avant la dualité d'appréhension du réel et soulignions sa complémentarité : le réel advient en l'unité de l'expérimentation de deux opposés. Le réel n'est ni l'un ni l'autre ni les deux à la fois mais bien l'infinité des possibles entre ces deux là.
Nous évoquions déjà le temps et la lumière, mais aussi le désir, l'amour, l'affectif.

Dans Réveil de la Source, j'évoque intimement la résonance d'un complexe et d'un être en invitant le lecteur à se pencher non sur les états (les mots, les symptômes, les faits) exposés mais plutôt sur l'hyperstructure génératrice de ces états. Encore une fois, rendre compte d'une réalité par volonté de trouver invariants et algorithmes. Déjà, évidence d'un tiers irréductible, d'une distance entre action et être.

Dans Voir et Connaître, nous tombons sur l'envers du décor, sur l'expérimentation complète d'une déconstruction/reconstruction, sur un pas à pas du multi-référentiel. C'est dur, sec, décapant, aride et nécessaire. En filigrane, cousus d'or, les mots voir et connaître : la lumière et son sens.

Dans de l'Ouvert à la Systémique, une rencontre humaine décisive (unitaire) ouvre le champ (infini et continu) des investigations de l'être en les projetant dans une somme finie d'ouverts disjoints (les possibles discontinus). L'exploration systémique de ces ouverts doit aboutir au changement de vue sur le monde : celle, critique, qui change le monde ! Mais l'exploration n'est jamais solitaire, l'alliance, l'affectif, emplissent le champ psychique de la relation à l'autre.

Dans le Temps n'existe pas, (antédaté : "le temps est il ?"), nous provoquons le lecteur en le confrontant aux multiples paradoxes de son horloge sociale et culturelle et l'invitons à prendre conscience que dans l'ombre du temps réside certainement toute son unique substance et consistance : (passé, présent, futur) = (mémoire, attention, attente) = 2 opposés et l'amour ?. Le temps n'est pas "en dehors", c'est certain, il est ce chemin infini, cette tension du triplet irréductible.

Dans Ombre et Principe d'Antagonisme, nous trouvons enfin les concepts qui unifient nos éclats. Hors d'un mouvement, il s'agit juste d'un retournement : exclus, inclus, Tiers irréductible. Mais quel retournement ! La complexité jusqu'alors étalée (et simplement reliée) se concentre, se ramasse sur un ensemble de triplets logiques. Une telle condensation est néguentropique. Il reste maintenant à réitérer...

Dans Tiers Inclus : logique, ontologique et amour, nous réitérons : nous couplons le triplet logique à l'abduction puis itérons le processus jusqu'à l'émergence du Transdisciplinaire : système ouvert entièrement décrit par la triade (Objet T, Sujet T, T s.i.).
La triade : ce concept minimum et maximum, nécessaire et suffisant, pour initier et contenir la complexité.

Dans Impasse non-commutative, j'évoque la rupture du récit, entre informe et forme, entre non-être et être, potentiel et actuel et ma rencontre décisive avec ce qui sera la clé, le Tiers inclus de ma démarche, la minuscule clé de la nouvelle vue sur le monde : la lumière !

A ce stade, la perturbation est grande. La paroi est très abrupte mais l'évidence semble lumineuse : comment en rendre compte ?

lundi 22 février 2010

Réveil de la source

Bien avant Jean Staune, il y a eu Jeanne Siaud Facchin (JSF). Entendue un après midi sur France Inter, au printemps 2008, des mots, dont ma mémoire s'est libéré, ont ouvert des espaces attendus. C'était à l'occasion de la sortie de son fameux livre (très discuté par les professionnels de la profession !) : Trop intelligent pour être heureux : l'adulte surdoué. qui venait après le plus académique "L'enfant surdoué : l'aider à grandir, l'aider à réussir". Car, écrire, en France, sur la précocité de l'enfant, est mieux perçu que sur le surdouement de l'adulte. JSF s'est demandé simplement (à la suite de nombreux lecteurs qui n'avaient pas oublié de grandir et qui d'enfants étaient devenus adultes !)  ce que devenait l'enfant précoce, une fois que Peter Pan a laissé son pays imaginaire pour revenir habiter notre monde.
Et là, l'enfermement sémantique de la précocité frappe de plein fouet : en effet, qui écrit et dit "précoce" (avance temporelle !) laisse irrémédiablement sous entendre un retour à la (loi) "normale" : qui peut prétendre sérieusement étudier un adulte précoce de 50 ans ?

JSF s'est donc coltiné l'analyse des entretiens réalisés sur les adultes interpellés par les ouvrages traitant des enfants précoces qui leur actualisait violemment leur propre histoire passée et des parents actuels de tels enfants. Enfin, JSF a tenté, sur la grille d'étude de l'enfant précoce, de discriminer un certain nombre de comportements, d'états psychiques propres aux adultes devenus. Devenus quoi en l'espèce ?
Il fallut bien sortir du piège sémantique et en se rapprochant d'autres études internationales sur l'intelligence, depuis les débuts de la psychométrie, enfin admettre avec sérieux un état général adulte plus complexe que le "normal". Car, in fine, il s'agit bien de cela : réunir une complexité. Relier ensemble de nombreux symptômes, dont certains sont décrits et documentés par le DSM IV (tableau des psychopathologies), en un état singulier, non pathologique, ouvert.
Or étudier cliniquement une singularité est aisé; faire de même (avec les seuls outils de la psychologie clinique en tout cas) sur un ouvert est carrément casse gueule ! Voilà pourquoi le courage de JSF est exemplaire : oser défricher et affronter les modèles dominants, et source de critiques faciles : ce livre est un fourre tout !

Ma fille cadette a été testée classiquement par le WPPSI-R et cette entrée dans ma vie familiale d'une telle information m'a dérouté. Je ne comprenais pas, en la voyant vivre près de nous, comment cette fameuse "précocité" s'extériorisait. Ce test était une réduction de son état psycho cognitivo affectif sur une échelle de grandeurs normalisées par une loi de distribution statistique. (point!) Me dire que ma fille avait un QI de 144 ne s'ancrait dans aucune réalité affective et les explicitations techniques du test (et subtests !) ne renvoyaient qu'à la structure même de la mesure de ce qu'on nomme intelligence et non à une perception complexe et immédiate de la "chose". JSF m'a permis, par la complexité déroutante de son analyse clinique, d'entrevoir le véritable monde qui se cache derrière la loi normale de distribution dans la population du QI !

Ce livre a été, pour moi, à cet instant de ma vie, et aux dires même de ma femme, l'occasion d'une véritable renaissance.

Deux points m'ont frappés et percés intimement dans la description que fait JSF des facettes de la personnalité d'un surdoué : "Celui qui a l'âge du monde" (p.155) et "La faille spatio-temporelle : vivre dans plusieurs espaces-temps" (p.158). J'ai été, entre autres choses, nourri, à l'adolescence, de lectures de science fiction (Asimov, K Dick, Bradbury, Van Vogt etc.) et ces facultés étranges que décrivait JSF dans son livre "sérieux" me ramenaient à ces mondes imaginaires de mes auteurs autrefois préférés. C'était incongru. Et troublant.

Celui qui a l'âge du monde est hypermature et caméléon, s'ajustant en permanence au plus près des contraintes de son environnement et par corollaire expérimentant de multiples identités ou plus finement dit expérimentant une identité hyper-éclatée. Car le caméléon a bien sa propre identité qui est justement liée à sa capacité d'en rendre intelligible une multitude. Cet "effet" caméléon est très bien illustré dans l'œuvre de N. Lygéros et relié notamment à l'altruisme. Nous y reviendrons...

Celui qui expérimente "la faille spatio-temporelle", vit dans plusieurs espaces-temps. Cette expression de Marine Ambrosioni, une collaboratrice de JSF, signifie que le surdoué se situe en permanence dans un ressenti global de son espace-temps. Chaque choix ici et maintenant doit prendre en compte l'avant, l'après et l'ailleurs. C'est aussi, comme on l'a vu, un corollaire du "multi-âge" car la perception du "soi" est "éclatée" dans l'espace-temps ou mieux dit : étendu sur l'espace-temps ! Ainsi, il est difficile de se détacher du contexte, il est difficile de discriminer le sujet de la globalité, sa vie personnelle de l'univers dans son entier. Enfin, pour le surdoué, il persiste toujours une distance, aussi infime soit elle, entre son action et son être, "qui crée cet inconfort qui conduira soit au dépassement de soi, soit à une acceptation contrainte, source de frustration."

Ces deux facettes explicitées par JSF m'ont transpercées car je croyais naïvement qu'elles étaient miennes, solitaires et inconnues de tous. A vrai dire, il est amusant et réconfortant de constater a postériori qu'il existe au moins une communauté à les partager !
Ainsi, JSF puis douance.be m'ont apportés des éclairages somme toute communs pour percevoir au final une complexité que la simple liste linéaire de "symptômes" ne peut en aucun cas rendre compte. Mais in fine, il faudra convoquer les analyses de Nikos Lygéros sur la douance pour tenter une vue conceptuelle issue des travaux cliniques des psychologues.

Il faut en effet élaborer une sorte de symbole en plusieurs dimensions capable ensuite, par projection, de traduire un à un des états psychiques et des comportements relativement banals et retrouvés finalement chez tous les humains. Ce n'est pas la somme des "symptômes" qui identifie le surdoué à coup sûr car j'ose espérer que cette somme n'est qu'un artefact (est il seulement possible de vivre avec tout cela ?) mais sans doute plutôt la capacité à en saisir l'algorithme, la construction, et le sens de l'hyperstructure génératrice ainsi dégagée.

Ainsi, le surdoué n'a rien d'un surhumain, il est simplement qualitativement structuré différemment. Et surtout, il y a autant de différences d'expression et de comportements dans cette population que dans la population globale.

Mais nous sommes loin d'en avoir fini.........

dimanche 7 février 2010

Reliences ?

Reliences est un néologisme.
C'est une tentative personnelle de transmettre une complexité.
Relience est attachée à relier comme un "mouvement porté vers".
Une "relience" n'est pas une liaison, mais plus une mise en relation.
Dans la relation, la "relience" amène une "attention à".
Cette "attention à" définit également une bijection entre deux sujets/objets et une mise en perspective.
Cette "attention à" est une saisie du réel, dans ce qu'elle a de dynamique, de fugace, d'éternelle aussi, dans un mouvement incessant, continument discontinu.
Par cette voie, la "relience" se rapproche de la volition.
Il est indéniable que la relience a à voir avec une voie spirituelle, par exemple, le vajrayana. Mais tout ce que contient la relience n'est pas réductible à cela...
Et il est néanmoins évident que même un Français éduqué selon des concepts judéo-chrétiens et immergé dans une métaphysique occidentale de source grecque peut appréhender ce geste sémantique, tout entier contenu dans "relience".
Car de nombreux philosophes, psychanalystes, penseurs, mathématiciens, physiciens, biologistes, rêveurs, poètes, peintres, karatékas, jongleurs, automobilistes, marins, danseuses, professeurs, comptables (?), consommateurs, spectateurs, comédiennes, clowns, cuisiniers, amants, banquiers (?), boulangers, charcutières, pêcheurs, théologiens, vigneronnes, chanteuses, écrivains....ont tenté déjà, tentent encore et tenteront toujours de se saisir de cette fugacité essentielle qui soutient leur existence.
Toutes ces tentatives contribuent à la compréhension (prise avec soi) collective de la relience !
Reliences n'est pas dogmes.
Reliences n'est pas vacuité.
C'est peut-être ce que voient les parties des parties des parties des parties....des parties ?
Mais Reliences n'est pas le tout.


Puisque aussitôt saisi, il disparaît. Aussitôt là, il est ailleurs.
Il est le blanc entre les mots noirs.
L'infini entre chaque nombre.
L'univers qui respire.
Une vague ? Une onde ?
Une singularité et une hyperstructure.
...
C'est au fond ma contribution d'amour à l'amour des hommes.
C'est si simple et si complexe à la fois.