Catherine Besnard-Péron m'a relié à l'INREES pour illustrer mes questionnements sur les changements de référentiels et notamment ceux liés à l'invisible/visible, au sein d'un certain contexte culturel et social. Il s'agissait d'explorer à la marge des cadres des expériences humaines forcément subjectives mais que certains scientifiques osent écouter et recueillir avec rigueur.
Ce projet de l'Inrees m'est apparu très sérieux et ouvert, non dogmatique : leur projet est bien d'écouter avec méthode et d'encourager ensuite le milieu médical à recevoir l'écoute de leurs patients avec la plus grande ouverture, sans jugement préétabli.
Le premier domaine qui m'a happé est lié à la mort ou plus précisément, pour être rigoureux, aux Expériences de Mort Imminente (EMI) (NDE en anglais). J'avais déjà lu, il y a longtemps, le fameux livre du Dr Raymond Moody : "La Vie après la Vie", paru en 1976. C'était à la fois très beau et ésotérique. Et très en avance.
Avec l'Inrees, j'ai découvert le Dr Jean Pierre Jourdan, docteur en médecine et vice président de IANDS France, association fondée par Kenneth Ring aux USA. Jean Pierre Jourdan s'intéresse à ces phénomènes depuis plus de 20 ans et a même posé les bases d'un modèle qui pourrait expliciter certains invariants rencontrés dans les très nombreux témoignages recueillis.
Les NDE sont des phénomènes complexes et plus encore parce que les sciences refusent pour le moment de s'en emparer ! Ces phénomènes nécessitent donc une prise en charge au moins pluridisciplinaire voire au final transdisciplinaire. Les NDE se rapprochent de manière générale d'états modifiés de la conscience et intéressent aussi les rapports subtils entre cerveau et conscience.
Dans son document "Juste une dimension", Jean Pierre Jourdan (JPJ) établit un cadre théorique, spéculatif, de la manifestation des NDE, en partant de faits "inexplicables" selon les modèles physiques à disposition. Il met d'abord en avant que les NDE semblent rendues possibles par le fait que la conscience soit isolée de ses interactions avec le monde physique. Dans son article "Les dimensions de la conscience", il relate même l'expérience de Pam Reynolds (1998) comme preuve irréfutable de la non induction de la conscience par le fonctionnement cérébral. Ce dernier article est d'ailleurs très pédagogique et fournit, avec des témoignages, les arguments pertinents qui sous tendent sa "théorie".
JPJ postule ensuite que le cerveau serait (tout de même !) une interface nécessaire à la conscience pour interagir avec l'univers physique, à l'instar de l'analogie entre l'appareil radio et l'émission sonore qui en sort. Dit autrement, sur la base de cette analogie, la "conscience" serait un champ étendu sur l'espace-temps et l'interaction locale se réaliserait par le biais du cerveau.
JPJ postule enfin que la conscience trouverait sa "localisation" dans une 5è dimension d'espace-temps qui permettrait l'explicitation de nombreux phénomènes récurrents décrits dans les expériences de NDE les plus "sérieuses". Son approche pédagogique se veut proche à la fois d'un raisonnement analogique et hypothético-déductif. Il a le mérite de créer un cadre simple pour englober l'ensemble des phénomènes invariants recueillis.
Il est troublant à le lire de trouver des expressions proches des miennes, alors que même nous ne semblons pas avoir les mêmes références. Je cite : "le temps se spatialise" (p.11); "le temps s'est arrêtée ou n'existe pas" (p.11). Je veux souligner ici que tenter de saisir le modèle d'espace-temps 4D à la marge, par les limites des équations (comme dire que le temps de la lumière s'est arrêtée à partir des équations de la Relativité Restreinte ou bien d'interpréter les fluctuations du vide quantique à partir des inégalités de Heisenberg...) revient en quelque sorte à prendre du recul voire à se "placer" carrément dans une dimension supplémentaire (perpendiculaire aux 4 existantes). L'analogie de Jean Pierre Jourdan est donc tout à fait "remarquable"; il reste à valider par des expériences rigoureuses le cadre ainsi dégagé et notre médecin établit même les pistes à explorer dans un projet de protocole hospitalier.
Il faut en outre préciser un point important : "Pour ma part, je considère que cette dernière phase (comprenant l’approche de la lumière, la rencontre éventuelle d’un « guide », la présence d’un Amour au dessus de tout ce que l’on connaît, la compréhension d’un but à sa propre vie, la sensation d’un point de non retour) est au delà du cadre que je viens de proposer." JPJ se garde bien dans son modèle d'aborder en effet les parties de témoignages les plus mystiques mais propose (à d'autres ?) de les regarder "avec des yeux neufs et un esprit ouvert.".
Avis aux amateurs ?
L'Inrees met aussi en relation avec le Dr Jean Jacques Charbonnier, actif dans l'écoute et la diffusion des expériences depuis 20 ans également. Nous trouvons sur son site un grand nombre de références qu'il est intéressant de lire ou de voir : du matériau pour se faire sa propre idée sur la question !
Enfin, je suis allé lire également les Actes du 1er Colloque (en juin 2006) sur les Rencontres Internationales au sujet de l'EMI (NDE), organisé et rédigés par Sonia Barkallah de S17 Productions. C'est un petit fascicule qui regroupe un certain nombre d'intervenants de très bon niveau qui connaissent parfaitement la question. L'intervention de Pim Van Lommel, cardiologue auteur en 2001 d'une étude publiée dans The Lancet est particulièrement riche en données quantitatives précises mais également en pistes de réflexion ouvertes.
En fait, les EMI n'ont vraiment rien à voir avec ce que nous nommons la mort, si on y réfléchit bien et il ne faut pas vouloir les étudier frontalement dans cette optique là, ce serait une erreur grossière. En revanche, elles nous interrogent sur la nature du concept occidental de conscience et le sens de la vie.
Dans cette optique, la valeur des matériaux dégagés est très riche.
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